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Genre… les mots sont genrés ?

Episode n°7

Les mots ont un genre. Et ce genre peut, parfois, complètement changer leur sens : maître ou maîtresse par exemple… Et cela relève de notre culture. Sauf qu’on finit par genrer non pas les mots, mais les cerveaux, ceux de nos enfants !

Le cerveau, ce mystérieux chef d’orchestre

On entend souvent dire que les hommes utilisent plutôt leur hémisphère gauche ou leur hémisphère droit, alors que les femmes, elles, feraient tout fonctionner en même temps. Vrai ou faux ?

Plutôt faux.

Ce qu’on constate, ce n’est pas tant une différence de localisation des fonctions cérébrales, mais plutôt de latéralisation. Le cerveau s’occupe du langage de deux façons :

  • L’aire de Broca, située dans le lobe frontal, gère la production et la syntaxe du langage.
  • L’aire de Wernicke, logée dans le lobe temporal, s’occupe de la compréhension.

Entre ces deux zones ? Le fascicule arqué, un faisceau de fibres qui assure la communication entre production et compréhension, entre ce que l’on dit et ce que l’on entend.

Les hommes, eux, ont souvent une latéralisation plus marquée à gauche, tandis que les femmes bénéficient d’une meilleure connectivité entre les deux hémisphères. Cela pourrait expliquer une plus grande aisance dans la communication ou la nuance.

Mais en réalité, la véritable clé, c’est la plasticité neuronale : notre cerveau évolue avec notre éducation, nos expériences et notre environnement.

Quand le genre des mots façonne notre vision du monde

Comme nos cerveaux sont malléables, ils sont influencés par le langage qu’on utilise au quotidien.

Prenons un exemple simple : certains mots changent radicalement de sens selon qu’ils sont masculins ou féminins. Maître et maîtresse. Un entraîneur et une entraîneuse. Un salaud et une salope.

Là où le masculin peut rester neutre ou valorisant, le féminin, lui, se charge souvent d’une connotation… comment dire… bien moins glorieuse.

L’usage des mots n’est pas anodin. Il reflète des siècles de culture, de rapports de domination et de stéréotypes inconscients.

D’ailleurs, dès l’enfance, ce conditionnement est à l’œuvre. Avant le CE2, les petites filles rêvent d’être astronautes, physiciennes, ingénieures. Après le CE2 ? Les statistiques montrent une chute brutale des ambitions scientifiques, au profit de métiers plus traditionnellement féminins.

Est-ce que les mots ont un genre ? Oui. Est-ce qu’ils influencent nos représentations ? Encore plus.

« Le fait que nos cerveaux naissent d’une certaine manière et puis ensuite sont façonnés. Et par quoi est-ce qu’ils sont façonnés ? Tout simplement, notre éducation, notre expérience, nos expériences, notre rapport au monde. Et c’est là que l’on peut commencer à genrer un petit peu. »

– Sonia Vignon, épisode 7 du podcast Le poids des mots

Le poids des mots dans la construction de notre identité

Notre manière de parler façonne la manière dont nous percevons le monde – et réciproquement. La langue est genrée, certes, mais au-delà de la forme, c’est son usage qui pose question.

Le langage repose sur trois piliers :

  • Le verbal : les mots eux-mêmes.
  • Le non-verbal : le ton, le regard, la posture.
  • Le para-verbal : le contexte et l’intention.

 

Selon notre âge, notre milieu social, notre éducation, nous ne recevrons pas les mots de la même manière. À 20 ans, une femme n’aura pas la même relation au langage qu’un homme du même âge, parce que, sans même s’en rendre compte, notre entourage ne nous parle pas de la même façon.

Et c’est là que réside la vraie révolution : plutôt que de chercher à effacer le genre dans la langue, pourquoi ne pas chercher à nommer les choses avec justesse ? Pourquoi ne pas employer des mots traditionnellement féminins pour parler d’un homme, et inversement, si cela sert mieux le message ?

Parce qu’au fond, la vraie question n’est peut-être pas celle du genre, mais celle de la justice.

Assumer pour mieux corriger

Tant qu’on dira aux filles d’être « gentilles » et aux garçons de ne pas pleurer, ce n’est pas la langue qui sera genrée, mais notre société entière. Plutôt que de la neutraliser, utilisons-la comme un levier d’émancipation en assumant ses biais pour mieux les corriger.

Le cerveau n’est pas genré par nature, c’est notre environnement qui le façonne. En prenant conscience du poids des mots, on peut bâtir une société où chacun trouve sa juste place.

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